Aperçu de l'histoire du Japon de 1051 à 1639
Heian (794-1185)
La splendeur (en Chine, la fin des Tang)
Fujiwara (969-1068)
Le Genji monogatari, Sesshô, Kanpaku
... C'est en chinois que les aristocrates écrivent leurs notes journalières, mais aussi des poèmes, les histoires officielles, les décrets et les édits. Mais la langue japonaise s'affirme...
La prose japonaise se constitue à cette époque. Mais elle est d'abord perçue comme le faire-valoir de la poésie, que ce soit dans les récits, monogatari, ou les notes journalières, nikki...
Le beau système administratif prévu par les codes ne fonctionnait que pour la cour, les provinces envoyant tous les produits nécessaires à sa vie. D'autre part, si on respectait les formes et qu'on nommait toujours des fonctionnaires, on s'aperçut que, comme pour le plan de la capitale, la pratique réelle évoluait. Le clientélisme devint la règle, de même que la perception directe de revenus en province sans passer par la filière normale de l'administration. Les grandes familles, mais aussi la famille impériale elle-même, se constituèrent des domaines, shôen, qu'elles géraient directement. Ce nouveau système de gestion vidait peu à peu l'administration de sa substance.
L'exemple en était donné par les établissements religieux, particulièrement les grands monastères. Deux écoles qui s'implantèrent au début de cette période donnèrent une nouvelle impulsion au bouddhisme. Le Shingon, école ésotérique issu du tantrisme, marqua profondément la civilisation japonaise. Le Tendai, qui alliait ésotérisme et exotérisme, fut le creuset des écoles qui s'épanouirent à la période suivante.
Insei (XIe-XIIIe siècles)
Les domaines, gouvernement des empereurs retirés
LE MONDE DES GUERRIERS
Genpei no tatakai (1159-1185)
La guerre entre les Minamoto et les Taira, Heike monogatari
Les moines érudits reprenant des calculs et des spéculations sur le temps, dont le bouddhisme fut toujours friand, proclamèrent que le monde était entré dans la période de la fin de la loi, mappô. La fin des temps est une notion relative dans le bouddhisme, et la fin de la loi est une période fort longue. Il n'empêche, les élites ressentaient la fin d'une certaine façon de vivre. La capitale ne pouvait plus ignorer les provinces. La haute noblesse de cour devait tenir compte des forces vives, les cadets étaient envoyés gérer les domaines en province. Elle pensa pouvoir les utiliser pour régler ses querelles de pouvoir. Mais, une fois entrés dans le cercle des dirigeants, ces nouveaux venus, les guerriers, accaparèrent le pouvoir. Le basculement de la société se fit au cours de la guerre qui opposa deux clans de guerriers, les Taira ou Heike, et les Minamoto ou Genji, les vainqueurs. L'histoire de cet affrontement sert de thème à la seule véritable épopée du japon, le Heike monogatori. Récité par des moines aveugles, ce texte, fortement imprégné par le bouddhisme, servira de matrice à la représentation des guerriers, mais aussi à la langue japonaise des temps modernes. A la différence des romans de Heian, le Heike emploie de très nombreux composés venus du chinois. C'est cette langue hybride qui est à l'origine du japonais contemporain.
Kamakura (1185-1333)
Les guerriers, le bakufu, le nouveau bouddhisme
La victoire des Minamoto se traduisit par une nouvelle structure du pouvoir. A côté de l'administration de la cour de Kyôto se constitua une administration parallèle, qui dans un premier temps ne concernait que les guerriers. A la tête de ceux-ci se trouvait le Sei.i taishôgun, généralissime pour combattre les barbares, certes nommé par l'empereur mais sans que celui-ci ait la moindre possibilité de choix. Le shôgun mit en place une organisation militaire, le gouvernement de la tente, bakufu, à l'image du quartier général d'un général en campagne. Ce gouvernement s'installa à l'est, à Kamakura, au bord de la mer, dans un site bien protégé facilement défendable. Le Japon avait alors de facto deux capitales. Situation qui se renouvellera pendant la période d'Edo. Pour le monde des guerriers, l'histoire commence à ce moment-là.
L'équilibre entre le pouvoir civil de la cour de Kyôto et le bakufu était fragile. Une tentative de restauration se solda par l'installation de l'administration militaire jusque dans la capitale. Celle-ci n'en continua pas moins à vivre au rythme des cérémonies et des nominations de fonctionnaires qui avaient de moins en moins de pouvoir réel en dehors de la cour elle-même. Pourtant le prestige de celle-ci demeurait fort grand. Elle continuait à donner le ton en poésie et dans les autres arts. Les guerriers de Kamakura s'efforcèrent de suivre l'exemple des aristocrates de la capitale, du moins dans le domaine de la culture.
Pour le reste, c'est un nouveau monde qui se met en place où l'Etat n'est plus structuré par les codes, mais par des liens de personne à personne, où les règles ne sont plus les mêmes selon le statut social.
Dans cette société en pleine mutation, le bouddhisme se diversifie. L'époque de Kamakura voit naître les dernières grandes écoles du bouddhisme japonais. Les deux branches du zen, le Rinzai qui restera proche du pouvoir et des guerriers, et le Sôtô qui connaîtra une assez forte implantation en province. Ce furent les deux dernières écoles à avoir été directement transplantées de Chine, si l'on excepte l'école Ôbaku à l'époque d'Edo. Les autres furent le fruit de l'évolution interne du bouddhisme japonais et plus particulièrement du Tendai. L'école de la Terre pure et la véritable école de la Terre pure prônaient une soumission totale à la force de l'autre, la force du bouddha Amitâbha (Amida). Les adeptes de cette dévotion unique à Amida, ceux qui sont tournés dans une seule direction, Ikkô, se recrutèrent dans toutes les couches de la population, dont la famille Tokugawa, mais particulièrement chez les paysans. Dernier grand mouvement, l'école du lotus. Son fondateur enseignait une vénération absolue au sûtra du lotus, Hokkekyô, le principal sûtra de l'école du Tendai.
Les voyages en Chine des moines en quête de nouveauté spirituelle permirent de donner une nouvelle impulsion aux contacts sino-japonais. Les moines de l'école Rinzai jouèrent un rôle fondamental dans la transmission de la culture chinoise des Song au Japon. En dehors du zen qui était malgré tout leur préoccupation principale, ils acclimatèrent au Japon une tradition de poésie et de prose chinoises qui est connue sous le nom de littérature des cinq montagnes, du nom de l'organisation administrative de l'école Rinzai en cinq monastères principaux. Ces mêmes monastères accueillirent de nombreux moines chinois. La peinture des Song suivit le même canal pour arriver au Japon, au point que l'on confond parfois, sous le terme de peinture zen, des oeuvres d'inspiration religieuse et d'autres qui furent peintes par des moines mais dont les thèmes n'ont rien de religieux ou de zen. Ce sont encore les moines du Rinzai qui feront connaître au Japon le confucianisme des Song, connu sous le nom de néo-confucianisme, doctrine qui devint l'idéologie officielle des Tokugawa (cf. chap. VIII).
Les relations avec la Chine des Song furent donc fructueuses, même s'il n'y eut pas d'échange d'ambassades. Les choses s'envenimèrent avec l'arrivée des Mongols. Une fois maîtres de la Chine, puis de la Corée, ils exigèrent la soumission du Japon. Devant le refus de celui-ci, ils lancèrent deux offensives en mobilisant des forces imposantes. Dans les deux cas, des tempêtes providentielles détruisirent les flottes. On évoqua a posteriori l'action des vents divins, des kami kaze. Premières tentatives d'une invasion du Japon, les attaques mongoles ne semblent pas avoir provoqué une mobilisation nationale, les guerriers qui participèrent aux combats cherchaient avant tout des récompenses en terres que le pouvoir ne fut pas en mesure de distribuer.
Les shôguns du clan Minamoto ne tardèrent pas à perdre la réalité du pouvoir au profit de la famille de Hôjô Masako, épouse de Minamoto no Yoritomo. Les Hôjô, dans une position parallèle à celle des Fujiwara à Kyôto, dirigèrent le bakufu, autrement dit une grande partie du pays, au nom d'un shôgun dont le rôle n'était plus que de représentation.
Muromachi (1336-1573)
Guerriers et aristocrates.
Nanbokuchô / Les cours du nord et du sud (1337-1392)
La légitimité en question
Ônin no ran Ônin-Bunmei no ran
Les troubles des ères Ônin et Bunmei (1467-1477)
Profitant de l'affaiblissement de la famille Hôjô, l'empereur Godaigo tenta de restaurer le pouvoir impérial et l'autorité de la cour de Kyôto. Sa tentative n'aboutit, à la suite d'une longue guerre qui vit deux branches de la famille impériale s'affronter, qu'à permettre à un autre clan de guerriers, les Ashikaga, de renverser le bakufu de Kamakura et d'en créer un nouveau à leur avantage à Muromachi (1336-1573), un quartier de la capitale. Pourtant cet épisode de la restauration de l'ère Kenmu restera le symbole de la légitimité impériale. Son exemple sera souvent invoqué au cours de la période d'Edo, jusqu'à sa répétition réussie en 1868. Il sera aussi le sujet d'une des oeuvres les plus lues de la période d'Edo, le Taiheiki, le récit de la grande paix.
Dans un premier temps, pour la cour de Kyôto, le bakufu de Muromachi n'apporta pas de grands bouleversements. Au contraire, les liens entre les deux aristocraties, guerrière et de cour, se renforcèrent. Les palais des shôguns donnent le ton d'une nouvelle architecture qui invente les formes classiques de la pièce japonaise, sol entièrement couvert de tatami, renfoncement légèrement surélevé, tokonoma, emplacement de la décoration florale, ikebana, et de la peinture sur rouleau vertical, kakejiku. Les Ashikaga laisseront deux des plus célèbres monuments de Kyôto, le Kinkaku ji, le pavillon d'or, au nord-ouest et le Ginkakuji, le pavillon d'argent, au nord-est.
Les shôguns Ashikaga acceptèrent de la Chine le titre de wang (japonais ô), roi vassal, pour pouvoir mener un lucratif commerce avec le continent. Cet acte d'allégeance leur fut reproché comme une trahison tout le long de l'histoire. Alors que le japon va entrer dans une longue période de guerres, les relations commerciales et culturelles avec la Chine ne cesseront de s'intensifier.
Le mouvement d'autonomisation des guerriers provinciaux se renforçant, le bakufu vit son contrôle sur eux devenir de plus en plus formel. Quand le dernier shôgun de la famille Ashikaga fut chassé de Kyôto par Oda Nobunaga, il n'exerçait plus guère de pouvoir en dehors de la capitale. Le basculement s'était fait à l'issue d'une des plus longues et profondes crises de l'histoire du Japon, les troubles de l'ère Ônin. Pour une question de succession dans la maison shôgunale, deux partis s'affrontèrent dans la capitale, réduisant celle-ci en cendres, et le pouvoir des shôguns à presque rien.
(p. 36-40)
Sengoku / les provinces en guerre (XVeč-XVIe siècles)
Guerre et bouillonnement culturel, élégance de la guerre
Azuchi-Momoyama (1573-1598)
La réunification et le début des Temps modernes
Edo (1603-1868)
Des guerriers sans guerre, des lettrés sans examen, des marchants sans reconnaissance, des villes en expansion dans un pays agricole
Repères chronologiques
Période de Kamakura
Période de Muromachi
Période d'Azuchi-Momoyama
Période d'Edo
Extraits de :
LE JAPON D'EDO, par François & Mieko Macé,
Guide Belles Lettres des Civilisations, Société d'édition Les Belles Lettres.
Histoire du Japon Hagakure : le clan Nabeshima
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